Quatrième Dimanche de Carême A
19 mars 2023
(1 S 16, 1b.6-7.10-13a ; Ep 5, 8-14 ; Jn 9, 1-41)
Partages d’Évangile des missionnaires
La liturgie de ce Dimanche soumet à notre méditation l’histoire de la guérison d’un homme aveugle de naissance. C’est un récit très symbolique qui nous met face à notre propre réalité : nos aveuglements. Privé du sens de la vue, l’aveugle est incapable de contempler la lumière. C’est une cécité physique. Mais, l’aveugle est aussi celui dont le jugement est incapable de rien discerner. Cette forme de cécité est dite du cœur ou de l’âme et elle est bien pire que la première.
L’Évangile de St Jean a cette particularité de nous amener à la contemplation d’une réalité spirituelle en partant d’une réalité matérielle : « per visibilia ad invisibilia » dirait Richard de St Victor. En effet, pour St Jean, le Christ est fondamentalement le Révélateur de Dieu dans le monde. Il est le Verbe fait Chair, c’est en Lui et par lui qu’a jailli la lumière de la création. Sa présence dans le monde nous apporte une lumière d’un ordre bien plus élevé pour y dissiper les ténèbres morales et spirituelles. Il est l’envoyé du Père et comme tel, Il est l’Amour de Dieu en acte : un Amour décisif qui remplit une double fonction : il est d’une part l’accomplissement de la promesse du Père et, d’autre part, celui en qui se réalise « le jugement du monde (9,39) ». Entrons donc dans le texte !
Jésus est sorti du temple : il venait d’échapper à une tentative de lapidation (Jn 8,59), après un dialogue houleux avec les juifs. Rappelons que le terme juif, chez St Jean, désigne souvent les fils d’Israël qui se ferment à la prédication de Jésus et qui deviennent ses ennemis. Leur obstination traduit leur aveuglement qui se manifeste dans une haine invétérée à l’égard de Jésus. Il est sorti du temple échappant à leurs mains.
Et voilà ! Jésus vit un homme aveugle de naissance. L’on peut imaginer un regard de Jésus plein de tendresse. Contrairement au regard de Jésus, celui des disciples était plutôt rempli de jugement. Ils cherchent le coupable : « Qui a péché, lui ou ses parents ? » Une question qui donne écho à une manière de pensée assez courante chez les juifs (Ex.20,5). La réponse de Jésus est plus que claire : ni lui, ni ses parents ne sont coupables. Mais c’était pour que les œuvres de Dieu se manifestent en lui. Dieu ne regarde pas comme les hommes !
« Il nous faut travailler aux œuvres de celui qui m’a envoyé » : Jésus exprime sa conviction d’être l’envoyé du Père. Et, sa présence est lumière : « Je suis la lumière du monde ». La guérison de l’aveugle né est une illustration de cette Parole de Jésus et une illustration du péché contre la lumière. En ouvrant les yeux de cet aveugle, il a aussi ouvert son cœur : l’aveugle est venu à la lumière, sa foi s’est renforcée et il est devenu disciple ; tandis que les adversaires de Jésus se sont enlisés dans leur état d’aveuglement. La cécité du cœur est bien pire que celle qui est physique.
Après la guérison de l’aveugle, celui-ci s’est vu interroger tantôt par ses voisins, tantôt par les pharisiens. Des voisins qui s’enquièrent. Des convocations, des interrogations, des injures de la part des pharisiens débouchant sur l’action de le chasser de la synagogue. On a vu se dérouler un vrai procès. Cependant le véritable verdict, c’est Jésus qui va le prononcer. Il y a un renversement de situations (9,39) : le coupable ce n’est pas celui qui avait été aveugle mais ceux qui prétendent d’être des voyants. Les vrais aveugles sont ceux qui refusent de voir la manifestation de l’œuvre de Dieu.
En ce Dimanche, il y a lieu de nous remettre en question, considérant nos obstinations, nos jugements téméraires, nos refus de revenir à la vérité, pour satisfaire notre orgueil. Aveugle de naissance, faible acuité visuelle ou dégénérescence maculaire, nous souffrons tous de cécité ou de déficience visuelle. Faisons nôtre cette prière : Ouvre mes yeux, Seigneur, aux merveilles de ton amour. Je suis l’aveugle sur le chemin, guéris-moi, je veux te voir.
Jackson Fabius, smm